Les acteurs du projet / (témoignages)
concernant le spectacle La Secte :
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Olivier Puech - avril 2019
Oui, pour ma part j’ai été très heureux de participer à créer cette communauté hypnotique et radicale, de sentir le regard intrigué et bienveillant des spectateurs. Le poste de gardien alternatif, dedans dehors, à l’accueil et au plateau, je l’ai perçu et agi dans une logique de protection et de servitude à la cause de ce laboratoire du temps, de la parole retenue qui parfois s’épanche et des corps qui ne mentent pas. Il y avaient eux, les passants, les spectateurs et nous les membres, la famille dans une évidence, un dialogue muet mais perceptible.
Je répond présent pour la suite !
Olivier Puech
Marilyn Montalbano - avril 2019
Une parenthèse de temps qui offre à observer la vie, notre vie qui se tricote, minutieusement, lentement, inlassablement, en un seul et même geste, en un seul et même rouge qui circule, qui palpite sous nos yeux.
Un mouvement, névralgique - parfois une transe - qui se propage de corps en corps.
Des corps qui se frôlent, s’attachent, s’agrippant pour mieux s’éloigner, se retrouvent, s’entrelacent tels les mailles d’un seul et même tissage, tels les atomes d’une même molécule, les molécules d’une même cellule, les cellules d’un même Etre, central, inexorablement seul, lui aussi.
Une même voix, qui coule de bouche en bouche, en une prière, un cri.
Les mêmes questions.
Le silence.
Et puis au loin, les bruits du Monde qui continue lui aussi sa révolution.
Une alchimie entre organique et spirituel, un moment de regard sur un soi profond, comme si, lors d’un court instant, un retour In Utero était possible.
Marilyn Montalbano
Pascale Karamazov - juin 2019
J’ai demandé à Laurent si je pouvais rejoindre « La Secte » sans rien savoir de ce qui allait se passer exactement pour moi… parce que justement je ne savais pas, je ne savais pas ce qui allait se passer, c’est pour cette raison que je voulais être dans cette aventure, Alors je suis devenue une « Gardienne »… j’ai fait du tricot, oui j’ai tricoté un ouvrage que d’autres avant moi avait débuté, un ouvrage de laine rouge, j’ai exactement fait du tricot, j’ai profondément plongé dans l’action de faire du tricot, j’ai vécu chaque mailles et chaque gestes de ce tricot, c’était fondamental et je suis devenue immense par cette action, je le sentais, je le savais, j’étais immense, mystérieuse, et éternelle et immuable comme une de ces statues de l’île de Pâques…
j’étais une « Gardienne », et j’ai veillé sur les autres, en communion avec eux, sans savoir pourquoi je veillais ou surveillais, et ce n’était pas important pour moi de le savoir… Ce qui était important et vital c’était d’être complètement là, avec ces autres qui eux aussi, je le voyais, étaient là, totalement là, dans ce présent qui était là sans fin.
assise sur ma chaise, j’ai parfois aperçu au loin sur des chaises vides des morts que j’ai connu vivants… Et j’étais là aussi pour ces morts…
J’ai aussi parlé à des gens qui s’approchaient de moi, je leur ai dit des mots qu’ils n’entendaient pas mais qui étaient des mots qui se vivaient en moi pour moi-même et pour les autres…
Je me suis levée et j’ai marché en étant envahi par des sons et de la musique qui semblaient sortir de moi. L’autre monde, celui d’hier et de demain n’existait pas n’avait jamais existé, Son nom même n’avait jamais existait. j’ai accepté de venir m’allonger à tes pieds comme si j’acceptais de venir mourir pour renaître à nouveau, et revivre de nouveau pour mourir encore. Et revivre éternellement avec cette musique qui sort de moi, comme si tout à jamais devait se répéter et que tout ce qui se joue là était ma seule destinée… Une destinée solitaire, mais partageable…
Dans la secte j’ai cru être une église vivante, un être sacré et pourtant insignifiant, éternel et mortel tout à la fois sans passé, sans futur, juste là, avec d’autres juste là.
Exactement là.
Pascale Karamazov
Stéphanie Louit - juin 2019
La secte, j’en suis une adepte sans savoir ce que c’est exactement. C’est un objet immense qui va bien au-delà de moi, mais c’est aussi un endroit intime qui n’appartient qu’à moi. Parfois ça me rappelle la cour de récréation, quand on était petit et qu’on s’ouvrait les mentons sur les marches trop hautes, on inventait des règles de jeu, des nouvelles à chaque fois, on les suivait à fond, mais vraiment à fond, on y allait corps et âmes et on se sentait vivant sans faire l’effort de l’être : la secte, ça rend vivant, plus que vivant, c’est comme l’inverse des zombis. C’est l’impression, peut être un peu mièvre, de faire partie d’un grand tout qui suit sa propre logique et qui avance en rond ; ce qui d’ailleurs ne mène qu’au point de départ, toujours au même point de départ mais toujours plus fatigué, et sans jamais avoir finalement reproduit quoique ce soit. La secte ce n’est pas une boucle qui se répète, c’est une boucle qui se réinvente au présent et où la question de sa place est toujours remise en jeu. Et ce jeu là m’apparaît finalement bien plus tangible que la vie réelle.
Stéphanie Louit
Marilyn Montalbano - juin 2019
Moi, dans la secte, je suis nettoyeuse. J’arrive avec mon seau et ma serpillère quand tout le monde est allongé au sol aux pieds de Laurent. Je viens au devant de la scène, je remplis mon seau avec l’eau bouillante de la cocotte, que je verse lentement. Je repose la cocotte et je commence à nettoyer le sol, avec cette eau fumante, en évitant soigneusement les corps, et en faisant des 8, en un geste lent
et continu, inlassablement répété.
Dans la secte, je suis aussi une chasseuse, une chasseuse d’images. Je me trouve dans une grande boîte en carton, isolée de tous. Avec mon appareil photo autour du cou, je rentre dans la boîte en poussant les deux portes battantes qui se trouvent à l’arrière. Une fois à l’intérieur - il y fait très chaud - je me déplace en tenant les poignées intérieures pour faire glisser la boîte, qui a des roulettes, en regardant par la fenêtre carrée qui se trouve à l’avant. Je me rapproche des gens, suffisamment pour pouvoir faire ma mise au point au travers de la fenêtre. Clic, je prends une photo et puis je recule jusqu’au garage, lentement, pour ranger la boîte. Et ainsi de suite, tout au long d’une boucle…
Ensuite, en fin de boucle, je rejoins les autres et je trépigne avec eux sur la musique finale. Le trépignement commence dans les pieds, puis remonte progressivement vers les genoux puis dans les hanches sans que le haut du corps ne bouge jamais. Et puis, tout en trépignant, je recule comme les autres vers le fond pour disparaître dans les coulisses dans la continuité d’une ligne droite…
Marilyn Montalbano